S’il est un mot qui me fait saigner les yeux et les oreilles m’horripile en matière de parentalité/éducation, c’est le mot bienveillance.
Je l’ai employé à une époque, puis après une transition où je le maintenais pour m’aligner avec mes interlocuteurs, afin de parler le même langage, j’ai fini par quasiment l’abandonner, pour m’aligner, cette fois, avec moi même, tout en gardant un œil critique sur son emploi.
Pourquoi un mot porteur d’une si belle valeur, a priori, serait-il problématique ?
Sommaire 👉
Un mot, deux mots, momo…
Pour commencer, c’est un mot désormais tellement galvaudé que sa définition se noie dans des perceptions et interprétations qui deviennent personnelles, et donc, subjectives.
C’est également devenu un terme marketing, employé dans tous les domaines, et qui fait particulièrement vendre en matière d’ éducation.
Il englobe pourtant des pratiques qui sont parfois violentes entre adultes et même envers les enfants!
Si on se penche sur sa définition, il y a matière à discuter: entre celle du dictionnaire/ langage courant et celle du champs de la parentalité/éducation, il y a déjà quelques nuances.
Commençons par celle du champs de la parentalité, en retenant une définition proposée par le Dr Catherine Gueguen dans “Pour une enfance heureuse”: ce terme est une combinatoire d’empathie (cognitive, dans le sens comprendre l’autre) et de sympathie (vouloir le bien de l’autre).
Cette définition est pertinente quand à décrire la posture d’adultes envers des enfants ayant à coeur de les accompagner dans une atmosphère secure et épanouissante : avoir de l’empathie et vouloir leur bien.
Ce qui me gêne du coup dans ce champs, ce n’est pas tant sa définition que son emploi: si la posture de l’adulte n’est pas bienveillante, elle est quoi ? malveillante par opposition ? Or je doute que des adultes, à moins d’être sadiques, veulent du mal aux enfants…
Ainsi sauf une minorité de cas, les gens veulent a priori le bien de leurs enfants même en leur faisant du mal (donner des fessées éducatives ou des punitions pour apprendre etc).
Je m’abstiendrai de faire d’autres généralités mais je suis interpellée sur le côté binaire qu’induit l’usage de ce mot…
La bienveillance : la main de fer dans un gant de velours…
Ensuite, si on s’intéresse à l’étymologie du mot, et là revenons à la définition courante, ce terme a désigné pendant plusieurs siècles une posture d’une personne supérieure vis à vis d’une personne inférieure.
Petit aperçu de son histoire à l’académie française:
Lorsque l’on est dans une vision égalitaire et de respect mutuel, utiliser un mot qui renvoie à cette verticalité relève clairement d’un paradoxe.
Cependant, il semblerait que les parents qui ont à coeur de garder la verticalité, c’est-à-dire cette position où eux sont placés au dessus de leurs enfants, sachant mieux qu’eux ce qui est bon ou pas, se satisfont de ce concept pour opposer leur posture aux traditionnelles violences éducatives ordinaires.
Or dans une logique d’inversion du paradigme éducatif cela ne peut suffir : la position de dominant/dominé est justement à la source des rapports de force et donc le terreau de la violence.
On ne peut alors rester figé dans un schéma qui l’alimente : la bienveillance éducative représentant de fait juste une façon plus douce d’éduquer ses enfants dans la même logique que celle de la violence éducative, en se plaçant au dessus d’eux…
La logique est exactement la même puisque les objectifs, la finalité, ne changent pas : on fait faire à l’enfant ce qu’on a décidé pour lui, ce qu’on désire, ce qu’on pense bien/juste/nécessaire etc.
La seule chose qui change c’est la façon d’y parvenir : quand certains utilisent la manière forte et les violences, d’autres utilisent les subterfuges de la parentalité bienveillante ou dite “positive”. Ces subterfuges qui reposent sur beaucoup de manoeuvres de manipulations, or la manipulation est une forme de violence éducative…
Cela est souvent fait inconsciemment par les parents, puisqu’on leur a vendu une autre façon de faire qui serait, elle, acceptable, validée par des “experts » ou professionnels, faisant autorité en la matière.
Le terme parentalité “positive” est effectivement une autre façon de parler de cette bienveillance éducative et elle ne me convient pas non plus.
Et ce pour les mêmes raisons : le côté binaire positif/négatif (ceux qui ne la pratiquent pas seraient négatifs ?), et tout le lot de récompenses qui sous tend les pratiques de parentalité dite “positive” : la récompense étant le revers de la même pièce que constituent les violences des punitions…
Ainsi avec la “bienveillance” éducative on sort à peine de la logique “la fin justifie les moyens”, puisque la fin n’ est pas remise en question (le “pourquoi?” c’est à dire “faire faire à l’enfant”) la seule différence avec les VEO (Violences Educatives Ordinaires) ce sont les moyens qui entrent dans la balance (le “comment?”).
Certes cette prise en compte du “comment?” est une évolution, mais du coup bien trop mince pour une réelle inversion du paradigme.
Se crée ainsi une constante oscillation entre bienveillance et violence: les parents, las de ne pas atteindre leurs buts par la bienveillance, finissent par craquer et revenir aux anciennes méthodes…
C’est un véritable cercle vicieux.
“Sois bienveillante connasse! » ou l’injonction paradoxale de la parentalité actuelle.
Autre point qui m’interpelle découlant de ce paradigme du rapport de force ainsi maintenu : ce sont les injonctions à la bienveillance.
J’ai déjà lu ces injonctions faites dans la même phrase que des insultes: “soit bienveillante connasse !” est un exemple tiré d’échanges réels …
Injonction paradoxale, donc, qui manifeste à quel point les gens peuvent être dissociés et blessés demandant avec violence la bienveillance de leur interlocuteur.
C’est avec empathie que je considère cette injonction, puisqu’elle est le signe d’une souffrance. Mais je n’accepte pas sa formulation. Comprendre n’est pas accepter (ni légitimer, ni banaliser)
Cette injonction est doublement paradoxale car elle peut être faite :
1/ pour dénoncer des comportements violents d’adultes, or une telle injonction n’aura que pour résultat de les braquer et ce n’est pas en jouant sur le manichéisme bienveillant / pas bienveillant ou positif/négatif qu’ on pourra inverser la vapeur… Ce manichéisme est lui même une des dimensions des VEO.
2/ pour, à l’opposé, faire accepter des violences faites aux enfants : sous couverts de bienveillance envers les adultes, ces violences ne devraient pas être dénoncées et aucune critique ne peut en découler. Or si ces violences ne sont pas dénoncées, relevées, analysées comment peut on en prendre la responsabilité et donc les faire disparaître ?
Bien sûr il ne s’agit pas de flageller les auteurs desdites violences, car j’essaie aussi de m’extraire de la logique punitive (et du jugement de personnes) et ce pour tous les individus: pourquoi ce qui serait délétère pour les enfants (système de punitions/récompenses) serait positif pour les adultes?
La grande différence entre les adultes et les enfants en la matière ce sont nos responsabilités. Et je ne parle ni de faute, ni de culpabilité qui sont des notions encore différentes.
3/ pour s’octroyer de la bienveillance pour soi-même. Cette dernière injonction est très courante : “il faut être bienveillant envers soi- même avant tout pour pouvoir l’être avec les autres” oh que j’aime les yakafokon pleins de leçons/morale bonnes intentions…
On l’entend souvent à des parents épuisés qui s’évertuent à la bienveillance et finissent par craquer.
À aucun moment, on ne se pose la question du processus qui les mène à cet épuisement autre que le manque de bienveillance envers soi-même.
C’est effectivement bien pratique comme injonction quand on veut vendre de la “bienveillance en boîte” (ou en pdf…) et cela peut faire illusion, mais le paradigme restant inchangé: le même cercle vicieux se reproduira tant que la question du “pourquoi” on fait les choses , la finalité de notre posture, n’est pas remise en question.
Et si on retourne à l’étymologie du mot qui consiste à avoir cette posture bienveillante d’une personne supérieure envers une personne inférieure, être bienveillant envers soi-même ce n’est pas un peu le début de la schizophrénie ? On serait plusieurs à l’intérieur? on commanderait ainsi à la partie supérieure de nous de changer de posture ?
Je suis vraiment pour un apaisement et une démarche plus simple… Tout cela est trop compliqué, culpabilisant et marketing, manquant d’authenticité.
On passe à la caisse ?
Et oui certains paient cher, voire très cher, leurs tentatives de coller à ce modèle parental qui séduit, puisqu’il nous range dans la case des gentils (cf le manichéisme évoqué plus tôt…).
Cet épuisement est au final logique.
Premièrement, parce que nous ne sommes pas équipés pour changer de posture vis à vis de nos enfants.
Se mettre la pression pour une éducation différente, c’est un travers courant lorsque l’on n’a pas de repères en la matière, et ce du fait de notre propre enfance.
Nous avons été tellement conditionnés à mal -traiter l’autre par les mauvais traitements que nous mêmes avons reçus, qu’on se retrouve, pour la plupart d’entre nous, sans ressources pour assurer la bientraitance de base pour nos enfants.
Et je ne parle même pas du fait de les traiter respectueusement.
Donc malgré notre bonne volonté, nos choix, et nos prises de consciences, nous pouvons nous retrouver dans une phase difficile à osciller entre différentes postures, consciemment ou non, à nous interroger, à douter et, dans les pires des cas, à renoncer.
Les ressources auxquelles je fais référence, ce sont toutes les capacités qu’on a depuis notre naissance de façon innée et acquise, capacités liées à notre personne, mais aussi puisées dans notre environnement.
Celles inhérentes à notre personne ont souvent été altérées malheureusement, par exemple: l’empathie, une capacité innée qui s’érode par l’action des traitements non empathique qu’on reçoit.
Or nos enfants sont dépendants surtout en bas âge, il est donc normal qu’on surviennent à leurs besoins, notamment de sécurité, d’amour, de confiance, de respect etc. Ils n’ont pas tout à fait les ressources pour le faire eux-mêmes.
Et en plus de cela, on doit assurer ces mêmes besoins pour nous-mêmes, car si nous ne remplissons pas nos propres réservoirs, nous ne pouvons fonctionner pour nos enfants…
Heureusement, il y a des solutions à cette problématique, nous verrons cela ensemble dans un article dédié. Spoiler alerte : vous l’aurez sans doute compris, je n’adhère pas à la notion de sacrifice, ni celle des enfants aux besoins sacrifiés, ni celle des parents dits sacrificiels.
Les besoins n’ont pas à être vus en opposition, c’est donc grâce à notre vision de la problématique et donc nos lunettes, qu’on pourra trouver une issue favorable à tous.
Deuxièmement, parce que l’épuisement est lié à une attente irréaliste et paradoxale (oui encore nos lunettes de parents conditionnés sont pleines de paradoxes, on va essayer de désembuer tout ça!)
Cette attente est celle d’un résultat.
Combien de fois m’a t-on posé la question de ce que pouvait bien apporter la bienveillance: au final, est ce que les résultats en valent la peine ? Quelle est la valeur ajoutée d’une telle parentalité qui demande autant d’ efforts?
La bienveillance semble donc être perçue voire utilisée comme une méthode éducative avec ses objectifs et résultats.
Je ne peux concevoir que des relations humaines puissent être vues sous ce prisme. Raison de plus pour moi de ne pas adhérer au principe de bienveillance…
Évidemment avoir des relations épanouissantes et riches est déjà une attente mais je trouve que cette attente est bien différente d’une logique de rendement sur, notamment, comment vont évoluer nos enfants avec des “avantages compétitifs”.
“Mon enfant sera mieux dans ses baskets, plus épanouie, plus empathique, plus altruiste, plus écolo” etc.
Encore une fois où est la cohérence de nourrir des principes de performance et de compétitivité ?
Rien que d’être dans cette dynamique est épuisant… attendre quelque chose qui ne vient pas ou qui ne viendra jamais, c’est frustrant et énergivore.
Changer ses attentes constitue déjà une belle économie d’énergie!
Si je n’adhère pas à la notion de bienveillance surtout en matière de parentalité/éducation, c’est parce que je parle plutôt d’ accompagnement respectueux. Il s’agit de respecter la personne que sont nos enfants dans toute son intégrité, dans ses capacités, dans son développement, dans son rythme.
Et en raisonnant ainsi, la réponse à la question des résultats escomptés prend une autre dimension.
Quels résultats espère t-on à respecter nos enfants, les traiter comme des êtres humains, et répondre à leurs besoins au maximum ?
Car traiter son enfant de cette façon devrait être la base et on ne devrait même pas se poser la question si on a bien raison de le faire et ce que “ça va donner”.
A titre personnel, je n’attends rien de cette posture, je vois plutôt tristement ce dont manque tous les autres enfants qui eux n’ont pas cet accompagnement. Ce qu’on leur enlève plutôt…
Se poserait-on la question si ça vaut le coup de bien remplir son frigo pour se nourrir ? Ou ne se dirait-on pas plutôt que, si le frigo était vide, nos enfants risqueraient des carences ?
Remplir le réservoir de nos enfants et bien les traiter est aussi normal que de leur proposer de la nourriture en quantité suffisante et un toit sur la tête ainsi que de quoi se chauffer ( et d’ailleurs ils risquent d’avoir plus de carences en étant mal traités qu’en vivant de façon spartiate…).
Ne pas se jeter précipitamment sur le dernier concept à la mode en matière de parentalité/éducation, nous permet ainsi de revenir à des choses plus essentielles et basiques, d’économiser beaucoup d’énergie pour l’investir dans ce qui nourrira vraiment la relation à nos enfants.
J’espère que cet article vous aidera à changer de lunettes sur la bienveillance pour l’utiliser avec parcimonie 🙂
Maja Mijailovic – Accompagnante parentalité
Édit : pour un usage efficient du mot bienveillance je suggère ce billet .
Hello Maja,
je ne peux bien sûr que plussoyer…. ! Merci pour ta contribution.
Merci Evelyne <3
Aaaah merci, comme ça fait du bien! C’est exactement le cheminement de dedans ma tête ( et non schizophrène…enfin je crois?! 😉 ) depuis plusieurs années, à tenter de comprendre ce qui me dérangeait dans ces « termes » employés à tord et à travers…et j’en suis arrivée à la même chose la notion de respect qui est intrinsèque à l’arrivée, au désir de l’enfant, reste le comment? Merci Maja -j’espère écrire à mon tour pour semer…-
Avec Plaisir Stéphanie ! Au plaisir de te lire tu nous diras où on peut te retrouver 🙂
Bonjour,
Votre article est très intéressant et je suis plutôt de votre avis. La notion centrale est le respect la personne.
Mais quid de la tromperie ? On a tous connu ce moment où notre enfant joue avec un jouet et que même si on adore le voir comme cela, la situation fait que l’enfant doit laisser son activité. Comment faire comprendre au jeune enfant n’ayant pas acquis le langage qu’il est nécessaire de laisse ce jouet à sa place ? Ici la diversion (donc tromperie ?!) fonctionne plutôt bien pour éviter les « crises » et je ne vois pas comment procéder différemment …
Alors oui je brise son rythme et son développement n’est peut-être pas optimal à cet instant mais les circonstances sont parfois telles que cette démarche de stopper est obligatoire.
Idem quand les enfants s’amusent comme des petits fous quelque part mais que l’horloge qui tourne parfois trop vite nous oblige à mettre un terme à ce bon moment.
J’ai beau expliquer qu’on va bientôt y aller, qu’on retrouvera ce jeu plus tard etc …, c’est parfois compliqué.
Si quelqu’un est en mesure de m’éclairer à ce sujet, j’en serai très heureuse.
Belle journée,
C.
Bonjour Camille merci pour ton retour et ton questionnement, mais surtout pour ta patience du fait de ma réponse tardive (petit souci de technique cet été au niveau des commentaires).
Je pense qu’il est toujours nécéssaire d’être honnête avec nos enfants même quand cela implique une situation difficile pour eux, surtout je dirais quand ça implique une situation difficile, car cette honnêteté nourri la relation de confiance et elle est determinante pour comment l’enfant vit ces situations justement. Je répond à ton questionnement dans cet article dis moi si tu y trouve ta réponse : https://leslunettesdemaja.fr/sortir-du-faux-choix-ou-la-douce-manipulation/
Maja
Il est intéressant aussi de se pencher sur l’histoire de ce terme »bienveillance ». Il serait intéressant de le revisiter au regard de l’évolution des los de 89 puis 2007 sur la protection de l’enfance . À croiser aussi avec le plan de Périnatalité 2095/2007 sur la prévention quant aux liens précoces avec le bebe et ce avec en amont l’entretien du 4eme mois . Dommage que cet entretien-là ait perdu en spécificité souvent . Les médecins et les sage-femmes , seul-e-s habilités à le mener ne sont pas assez formés . Bref, ce terme de bienveillance cacherait -il tant de non-dits ?
Bonsoir Maja,
Je lis et comprends ton regard sur ce sujet cependant tout est toujours une question de point de vue et de définition y compris métaphorique.
Pour ma part, j’aime à penser que je pratique une forme de parentalité positive non dans le sens que tu as pu indiquer car je suis dans un concept plus spirituelle de ce type de parentalité. Quand je parle de parentalite « positive » c’est au premier sens du terme : « positif » – laisser l’enfant évoluer et vivre en fonction de ses besoins/désirs – ne pas lui mettre de « limites » concernant les possibilités de se réaliser – finalement éviter les « tu ne peux pas », « tu ne dois pas », « tu n’y arriveras pas » mais encourager, élever et faire confiance/ éviter de passer au négatif ses idées /par conséquent, rester positive face à ses envies / motivations, questionnements, etc…
Je suis malheureusement trop fatiguée ce soir pour développer mais parfois certaines personnes (comme moi) emploient une expression ou du vocabulaire simplement pour arriver à verbaliser une philosophie de vie juste dans le but de partager avec d’autres cette même vision de l’education de nos enfants.
Je ne sais pas si je suis claire par écrit et à travers ces quelques mots?
Quoiqu’il en soit je suis ravie de connaître ton blog.
Bonne soirée et à bientôt ?
Bonjour Saammotive
je te remercie pour ta patience, je comprends ce que tu veux dire c’est ce que je partage en introduction : j’ai longtemps utilisé ces mots pour pouvoir échanger avec mes interlocuteurs mais avec le temps je sens que un cheminement c’est fait de mon côté d’où mon alerte sur ces termes car nous n’avons au final pas tous les mêmes intentions sur leur emploi…
🙂
Maja
Bonjour,
J’ai lu votre article avec beaucoup d’attention, idées argumentées et longuement détaillées. Je rapprocherais ce système marketing de bienveillance – dans votre idée – du compliment ou plutôt de la flatterie pour atteindre un objectif désiré par les parents. Car une fois de plus, ce qui coince entre parents et enfants, selon moi, c’est l’opposition des « désirs » de chacun : par exemple, le parent désire que son enfant range sa chambre par exemple, l’enfant ne le désire pas etc. Ce problème ne se rencontre pas avec les besoins de chacun (besoins fondamentaux par exemple, être nourri.e, respecté.e, aimé.e, pris.e en compte dans l’expression de ses sentiments etc.). L’éducation bienveillante est un non sens. L’éducation est un processus complexe, qui aujourd’hui est érigé en objet marketing, culpabilisant pour beaucoup de parents ne se conformant pas à l’éducation bienveillante et positive. Par contre, je m’y perds parfois dans le manichéisme : l’enfant doit pouvoir aimer ce qu’il veut, qui il veut, se sentir bien dans ses baskets (ou ses mocassins, ou ses bottes ^^), jouer à ce qui lui plait, mais il doit aussi respecter des règles à la maison (des limites ?), en classe, etc. car culturellement, socialement, il doit le faire : ces règles (politesse, respect des règles de vie en classe ou à la maison etc.), qui sont une finalité pour une socialisation acceptable et un vivre ensemble correct, sont-elles un reflet du manichéisme imposé par l’adulte ? Ou simplement un outil pour une meilleure intégration sociale ? Car dans toutes les cultures, il existe un manichéisme de fait, que les parents vont transmettre à leurs enfants (ne pas taper, ne pas heurter etc.) et qu’un parent se doit de transmettre (empathie et sympathie), le problème est le comment en effet : on ne tape pas un enfant qui tape pour lui enseigner que le fait de taper est mauvais, on peut en revanche en discuter afin de comprendre ce qui l’a poussé à taper, ce qu’il a ressenti, ce qu’il pense que l’autre a ressenti et l’amener petit à petit à une réflexion sur cette action – mais il faut rester ferme… sans être autoritaire… pas simple de doser. De même avec le compliment (parfois utilisé en éducation bienveillante pour aussi parvenir à « ses fins ») : le compliment se distingue de la flatterie de nos jours, il est sensé être gratuit et sincère. Un petit compliment de temps en temps fera-t-il d’un enfant un être égocentré et égocentrique, imbus de lui-même, en quête perpétuelle de l’aval ou l’approbation de l’autre, ou renforcera-t-il la confiance qu’il peut avoir en lui ? Faut-il combiner au très ponctuel compliment gratuit (dont nous avons tous fait l’objet ou que nous avons tous énoncé, bien qu’un regard ou une accolade peut en dire bien plus) à des encouragements sincères qui pousseront l’enfant à la réflexion ? Il est toujours plaisant d’entendre « j’aime ton nouveau pull » par exemple, bien qu’on l’aimait avant de recevoir le compliment. Je suis en pleine prise de tête en ce moment ^^ car dans toutes ces méthodes finalement l’enjeu est le rapport à l’Autre, et l’être humain a depuis toujours, vécu dans un rapport à l’autre pour son évolution (et sa survie ^^). Finalement, les parents doivent donner à l’enfant des outils pour étayer sa réflexion, penser par lui-même, se faire confiance et ne pas se décourager, se respecter et respecter autrui, aimer et être aimé, être heureux etc. Tout est question de dosage…
Bonne journée à vous,
Charlotte
Bonjour Charlotte
Je te remercie pour ta patience (couacs dans mes commentaires depuis cet été) et je ter remercie d’avoir pris le temps de partager tes interrogations, peut-être réthorique? Ayant d’autres lunettes sur la question je te les propose :
« Car une fois de plus, ce qui coince entre parents et enfants, selon moi, c’est l’opposition des « désirs » de chacun : par exemple, le parent désire que son enfant range sa chambre par exemple, l’enfant ne le désire pas etc. Ce problème ne se rencontre pas avec les besoins de chacun (besoins fondamentaux par exemple, être nourri.e, respecté.e, aimé.e, pris.e en compte dans l’expression de ses sentiments etc.). »
=> Ca tombe à pic car cette question des besoins et désirs est le sujet de mon prochain article mais globalement ce que tu appelle désir j’appelle ça stratégie pour répondre à des besoins 🙂 et c’est effectivement sur les stratégies que ça peut coincer. A nous adulte ayant les capacités et responsabilités d’adapter nos stratégies en attenant que les enfants soient autonomes sur les leurs.
« Par contre, je m’y perds parfois dans le manichéisme : l’enfant doit pouvoir aimer ce qu’il veut, qui il veut, se sentir bien dans ses baskets (ou ses mocassins, ou ses bottes ^^), jouer à ce qui lui plait, mais il doit aussi respecter des règles à la maison (des limites ?), en classe, etc. car culturellement, socialement, il doit le faire : ces règles (politesse, respect des règles de vie en classe ou à la maison etc.), qui sont une finalité pour une socialisation acceptable et un vivre ensemble correct, sont-elles un reflet du manichéisme imposé par l’adulte ? »
=> oui clairement toutes les exigences que doivent suivre les enfants ne sont pas justifiées et souvent reposent sur des croyances voire ignorances sans aucune remise en question
« Ou simplement un outil pour une meilleure intégration sociale ? »
=>Pour une intégration sociale seules les règles/limites qui permettent le vivre ensemble ont un sens et seules celles qui tiennent compte des capacités des enfants et qui sont définies avec les enfants sont légitimes à défaut elles relèves d’exigences de l’adulte injuste et mettant l’enfant d’office en echec ou dans la soumission (regles/limites respectées non pas par compréhension ni capacité mais par peur du rapport de force induit).
« Car dans toutes les cultures, il existe un manichéisme de fait, que les parents vont transmettre à leurs enfants (ne pas taper, ne pas heurter etc.) et qu’un parent se doit de transmettre (empathie et sympathie), »
=> l’empathie est inée elle n’est pas à transmettre mais à préserver…
le problème est le comment en effet : on ne tape pas un enfant qui tape pour lui enseigner que « le fait de taper est mauvais, on peut en revanche en discuter afin de comprendre ce qui l’a poussé à taper, ce qu’il a ressenti, ce qu’il pense que l’autre a ressenti et l’amener petit à petit à une réflexion sur cette action – mais il faut rester ferme… sans être autoritaire… pas simple de doser. »
=> la fermeté c’est se fermer souvent … je n’adhère pas à l’emploi de ce terme qui induit un rapport de force le seul qui est légitime en cas de violence est de stopper l’action au moment où elle se produit dans le plus grand calme sans enjeux de la part de l’adult. La discussion qui s’en suit à froid doit être emprunte de grande empathie de la part d’adulte justement pour aider l’enfant à adopter d’autres stratégies. Je vais réediter dans mon blog un article que j’avais écris sur les crises et coups de l’enfant et la posture de l’adulte.
« De même avec le compliment (parfois utilisé en éducation bienveillante pour aussi parvenir à « ses fins ») : le compliment se distingue de la flatterie de nos jours, il est sensé être gratuit et sincère. Un petit compliment de temps en temps fera-t-il d’un enfant un être égocentré et égocentrique, imbus de lui-même, en quête perpétuelle de l’aval ou l’approbation de l’autre, ou renforcera-t-il la confiance qu’il peut avoir en lui ? Faut-il combiner au très ponctuel compliment gratuit (dont nous avons tous fait l’objet ou que nous avons tous énoncé, bien qu’un regard ou une accolade peut en dire bien plus) à des encouragements sincères qui pousseront l’enfant à la réflexion ? Il est toujours plaisant d’entendre « j’aime ton nouveau pull » par exemple, bien qu’on l’aimait avant de recevoir le compliment. »
=> les encouragements sont distincts des compliments oui car compliments et flatteries relèvent du jugement et sont le revers d’une même pièce avec les critiques négatives, dépréciation etc. On peut encourager en marquant notre confiance et soutien ce qui releve d’une démarche plus horizontale 😉
« Je suis en pleine prise de tête en ce moment ^^ car dans toutes ces méthodes finalement l’enjeu est le rapport à l’Autre, et l’être humain a depuis toujours, vécu dans un rapport à l’autre pour son évolution (et sa survie ^^). Finalement, les parents doivent donner à l’enfant des outils pour étayer sa réflexion, penser par lui-même, se faire confiance et ne pas se décourager, se respecter et respecter autrui, aimer et être aimé, être heureux etc. Tout est question de dosage… »
=> oui je suis d’accord sur la complexité du rapport à l’autre et des relations. Pour ma part je les vois avec les lunettes du vivant et je me refuse d’employer les termes de méthodes ou outils qui ne collent pas à mon sens à cette vision. Je refuse également de croire que les adultes ont le rôle que tu décris car cela sous entend une verticalité un adultisme : l’adulte sait et donc doit transmettre, je partage pas cette posture. Pour moi les enfants nous apprennent beaucoup plus sur les relations que nous leur apprenons à ce sujet. Un enfant nait avec un reservoir de confiance et d’estime plein, il nait avec une capacité spontanée à aimer et croitre par enthousiasme, à créer du lien, nous n’avons pas à lui enseigner cela nous devons le preserver et nous en inspirer.
Concernant la confiance je t’invite à lire le très détaillé ouvrage « j’ai confiance en toi » dont je parle ici :
https://leslunettesdemaja.fr/bienvenu/ressources/jai-confiance-en-toi/
Franchement je n’avais pas pousser ma réflexion aussi loin. Merci
Merci pour ton retour Mélanie 😀
Coucou Maja,
Quelle belle découverte cet article, et enfin je m’y retrouve !! C’est exactement comme ça que je vois ma relation avec ma fille. Depuis le début (même pendant ma grossesse), je lui parle et fais en sorte que tout se passe dans le respect de sa personne dans son entièreté !! Et c’est aussi comme ça que j’ai choisi sa nounou, C’ était LE critère pour trouver LA personne qui accompagnerait ma fille durant mes journées de travail. Alors oui au début c’est pareil je parlais de bienveillance, de parentalité positive. Mais bizarrement je ne me retrouvais pas forcement dans tous les propos. Et inconsciemment ou non, je n’utilisait pas ses termes non plus. Depuis le début je parle de respect , d’accompagnement dans ses besoins, ses envies…. Je suis ravie de te lire !!! Merci pour ta plume et ta réflexion !!!
(C’est le bazar dans mon commentaire, mais c’est la première fois que j’en laisse un sur un blog, alors indulgence svp ? !!!! )
Merci Gwen et surtout merci pour ta patience je suis en train de résoudre un problème de commentaires qui était présent depuis cet été et prend le temps de te répondre par la même occasion.
Il n’y a aucun bazar à ma lecture tout est clair et vraiment merci d’avoir pris le temps de le déposer <3
Maja
J’utilise beaucoup le mot de bienveillance, parce qu’il est connu et reconnu… Mais je ne l’aime pas non plus. Tout comme l’éducation bienveillante qui va avec… Je te rejoins sur quasi tout.
Je me pose néanmoins une question pour aller au bout du bout. SI on parle d’éducation respectueuse alors le pendant, le contraire, c’est une éducation irrespectueuse. Mais je crois que tout comme les parents n’ont pas envie d’être malveillant ils n’ont pas envie d’être irrespectueux ou sans respect. Même si j’avoue que ça sonne bien plus juste dans mes oreilles.
Le hic c’est que la différence entre ces éducations bienveillante/positive/respectueuse VS malveillante/négative/irrespectueuse est tellement ENORME que c’est violent d’en prendre conscience…. quelque soit le mot utilisé.
Bonjour Anne,
Oui tout à fait le contraire serait une éducation irrespectueuse mais pour le coup j’entends tellement les adultes dire que l’enfant DOIT D ABORD RESPECTER l’adulte que je n’ai jamais eu personne qui m’a dit que frapper son enfant ou lui crier dessus était tout à fait respectueux de sa personne … en général on a une excuse type « et bien ça lui apprendra le respect! ». Je suis beaucoup plus à l’aise avec cette opposition qui ne vient jamais à l’esprit de mes interlocuteur je n’ai jamais senti personne se braquer avec le terme de respectueux vu que c’est au contraire une valeur largement partagée 🙂 quand on arrive a connecter sur une valeur commune la discussion est plus fluide je trouve et du coup il n’y a pas cette violence qu’on peut trouver en opposant les formes d’éducations avec les étiquettes plus usuelles.
Bonjour,
Personnellement, j’ai connu l’attitude bienveillante de part mon métier (infirmière) qui ne nous avait pas du tout été présenté comme une idée de supérieur/ inférieur , mais bel et bien comme le dit Larousse: « Disposition d’esprit inclinant à la compréhension, à l’indulgence envers autrui ». Si l’on en reste à ces mots stricts, cela me convient tout à fait car il s’agit d’accéder à une compréhension de l’autre (son enfant) sans sous-entendre un objectif caché (range ta chambre, met tes chaussures, dis bonjour….).
Du coup, je visualise la bienveillance comme une attitude et non pas comme un « outil » . En cela, j’adhère à la bienveillance, envers tous et pour tous , dans la mesure de ce que l’on peut (on ne peut résolument pas être compréhensif et indulgent avec la Terre entière) (ou bien quelle sagesse d’esprit !).
Ceci dit, les termes de « éducation respectueuse » ou « éducation en conscience » me parlent totalement, merci !!
Bonjour et merci encore pour cet article, ses idées et les avancées qu’il permet.
Je suis assez d’accord avec Anne et Nanakie.
En tout cas, c’est un plaisir que de partager ici…
Merci beaucoup
Bonsoir!
Je suis tout comme vous horripilée par les tendances actuelles de « parentalité positive », de « bienveillance ». Cela place le parent dans une posture culpabilisante car on est parent avec ce qu’on est, ce qui nous a nous-même construit, ce que l’on a reçu, et cela n’a pas toujours été de la bienveillance! Un changement d’attitude ne peut pas être simplement « cosmétique »: j’ai 3 enfants et je suis de plus en plus dans une posture d’honnêteté. Je ne suis pas toujours patiente, pas toujours compréhensive. Parfois, je me trompe carrément mais j’en parle à mes enfants lorsque je m’en rends compte. Pas pour m’excuser, mais pour répondre à ce besoin d’être une maman humaine avec des émotions! Et souvent, cela libère leur parole et permet même de réparer parfois certains faux-pas!
Je suis dans cette recherche d’honnêteté également dans ma classe, car je suis enseignante. Toutes les émotions sont acceptées mais avec recul et formulées avec soin. Cela contribue à une atmosphère saine et, je crois, rassurante pour les élèves. Merci pour ce bel article.