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Vous pensez que votre bébé est un BABI, « bébé aux besoins intenses », ou quelqu’un vous l’a suggéré ? Vous êtes à la recherche d’informations sur les causes et les solutions à envisager pour gérer au mieux cette particularité ?
De plus en plus utilisée par les parents et les professionnels, relayée dans la presse parentalité, les blogs, et les réseaux sociaux, BABI est une appellation qui désigne certains bébés aux « caractéristiques spécifiques ».
De quoi s’agit-il exactement ?
Bébé aux besoins intenses : les symptômes
La notion de BABI a été définie par le Dr Sears, sur la base de constats d’une différence de comportements entre son dernier enfant et les autres.
Selon les définitions, un bébé aux besoins intenses aurait donc pour symptômes :
- Une hypersensibilité : « sursaute facilement », « a un sommeil difficile », « est anxieux avec les personnes qu’il ne connaît pas »
- Des comportements « excessifs » : il exprime ses émotions plus intensément que d’autres bébés, pleure fort, communique une certaine urgence absolue à ce qu’on réponde à ses besoins, en particulier lorsqu’il est séparé de ses parents.
- Un besoin de contact important. Les parents expriment le sentiment qu’il est impossible de poser leurs enfants.
- Une énergie constante : les Babi sont décrits comme des enfants très éveillés et constamment en mouvement.
- Un grand besoin de succion : des tétées non nutritives très fréquentes ou un besoin de tétines quasiment tout le temps afin de se réconforter.
- Une hypertonicité : des bébés « raides » qui sont très inconfortables en voiture et n’apprécient guère l’emmaillotage par exemple.
- Des parents épuisés, désemparés et souvent perdus.
Bien qu’on en décrive la plupart du temps des « symptômes », le concept de BABI n’est pas une pathologie et ne peut donc être diagnostiqué par un pédiatre.
À la lecture de cette liste, vous vous dites peut-être :
« Mais oui, c’est ça, c’est tout à fait mon bébé ! »
Si c’est le cas, pas de panique !
En effet dans d’autres pays où la connaissance des besoins des bébés est plus ancrée du fait de pratiques de maternage en répondance aux besoins des bébés, ces signaux ne mettraient personne en alerte puisqu’ils décrivent plutôt des bébés… tout simplement !
Alors est-ce que ça existe vraiment, les BABI ?
Bébés aux besoins intenses : mythe ou réalité ?
Pourquoi des besoins différents ?
Tous les bébés ont besoin d’être portés et d’être en contact continu avec leur figure d’attachement, ce n’est pas une question d’être un bébé aux besoins intenses, mais la caractéristique physiologique du petit d’homme.
Les bébés humains naissent très prématurément. D’un point de vue neurologique et en comparant aux autres mammifères, les enfants devraient naître après 18 mois de gestation.
Ce qui veut dire que jusqu’à cet âge, ils continuent une croissance extra-utérine qui devrait être proche de leur condition intra-utérine en ce qui concerne la proximité avec sa figure d’attachement.
On pense à tort que les enfants souffrent de la séparation autour des 9 mois seulement, avec la fameuse “angoisse de la séparation”. En fait, ils en souffrent bien plus tôt et jusque très tard.
Le maternage est ainsi la continuation normale de la grossesse. C’est ce qui est prévu à la base dans l’évolution de notre espèce, pour le bon développement physiologique des enfants.
Ils sont “programmés” de cette façon et nous parents également.
Ces pratiques proximales que « réclameraient des bébés aux besoins intenses » se sont des pratiques qui répondent donc aux besoins de tous les enfants et qui peuvent paraître « intenses » dans des cultures où elles ont été abandonnées.
Le terme “BABI” n’est pas rigoureux parce qu’un besoin intense ça ne veut rien dire. Il n’y a jamais eu de notion d’intensité ou de degrés quelconque en termes de besoins. Il n’existe aucune définition des besoins qui colle à cette notion.
Les besoins sont universels par définition (c’est le plus petit dénominateur commun chez l’Homme) : ils sont les mêmes pour tous les humains indépendamment de leur âge, sexe, ethnie.
Il n’existe pas des personnes qui ont plus de besoins que d’autres.
Si l’on parle de besoins en termes d’intensité ou de besoins différents d’un individu à l’autre, alors il ne s’agit plus de besoins, mais de stratégies, c’est-à-dire les actions mises en place pour remplir ces besoins.
Ce qui peut être intense et différent d’une personne à une autre en revanche, c’est la façon dont les besoins sont exprimés justement, les stratégies utilisées par les individus pour remplir leurs besoins et cela est lié notamment au tempérament.
Voir cette publication sur InstagramUne publication partagée par Maja Accompagnante parentalité (@leslunettesdemaja) le
L’expression “besoins intenses” est donc erronée si l’on veut parler de cette différence d’expression des besoins.
Attention cependant, certains besoins s’intensifient dans leur expression si l’on ne s’en occupe pas et cela n’a rien à voir avec le tempérament !
Derrière les Babi, il y a donc :
- Des enfants avec une intensité émotionnelle plus forte et des stratégies notamment innées pour exprimer leurs besoins de façon plus intense.
- Des enfants dont les besoins ne sont pas remplis, souvent parce qu’on manque d’informations utiles en tant que parent, ou par conditionnement. On a alors beaucoup de mal à identifier les besoins que le bébé exprime et y répondre de façon adaptée.
Parfois, il s’agit également d’enfants dont le tempérament est très différent de ceux de leurs parents ce qui amplifie l’incompréhension. On peut alors se retrouver à utiliser en tant qu’adulte des stratégies de réponses inadaptées aux besoins exprimés par les enfants.
Quand on utilise “Babi” pour exprimer les comportements d’un enfant qui agit en conséquence de stratégie de réponse inadaptée, on s’éloigne d’autant plus du besoin à traiter. C’est un véritable cercle vicieux.
Cette étiquette “Babi” masque donc beaucoup de choses. Plus grave encore, des problèmes physiologiques peuvent passer à la trappe…
Pourquoi le terme BABI peut-il être lourd de conséquences ?
Lorsqu’un bébé est en difficulté, qu’il l’exprime par des pleurs et réactions fortes, de façon fréquente et soutenue, il se peut qu’il y ait un problème physiologique non identifié.
Dans notre culture encore fortement emprunte de psychanalyse, et où tout est systématiquement ramené à l’affect quand il y a des difficultés avec les enfants, où la mère qui s’inquiète de réactions trop intenses de son bébé est soit trop couveuse soit folle, on ignore cette piste de base qu’est la physiologie.
Et cette erreur émane évidemment des professionnels qui se sont justement un peu trop précipités à utiliser l’étiquette BABI qui les enferme dans une logique psychoaffective.
Parmi les pistes physiologiques à explorer face à un bébé qu’on aurait envie de mettre un peu trop vite dans la case Babi il y a :
- le RGO et les allergies
- des problèmes de freins restrictifs
- des problèmes ostéo/posturaux
- des pathologies
Pour éviter d’ignorer une piste sérieuse, j’invite toujours les parents à solliciter un professionnel de santé en cas de doute et à parler de façon factuelle des états de leur bébé lorsqu’ils adressent leurs craintes.
L’étiquetage Babi au lieu d’un diagnostic sur un problème physiologique peut avoir de lourdes conséquences du fait de défaut de prise en charge.
Par ailleurs, les étiquettes sont toujours stigmatisantes et font porter un regard différent sur la nature de l’individu qui la porte. Parfois, elle est empreinte d’empathie et l’étiquette est « utile », si l’empathie n’était pas venue sans l’étiquette.
Mais une étiquette peut ensuite être difficile à décoller.
Les parents qui se voient « diagnostiquer » un Babi ou utilisent spontanément l’étiquette peuvent entrer dans une logique type “Mon bébé est comme ça” sans modifier leurs comportements qui pourraient aider l’enfant à aller mieux en répondant de façon plus adaptée aux besoins.
D’autres disent avoir besoin de cette étiquette pour mieux comprendre leur enfant, ne pas se sentir seuls, etc.
Lorsqu’on ne trouve pas d’autres options pour avancer, l’étape “rentrer dans des cases” peut nous faire cheminer je peux l’entendre.
Malheureusement beaucoup d’adultes s’arrêtent à cette étape.
La notion d’étiquette est très pesante lorsqu’elle devient la définition de la personne. C’est le cas par exemple lorsqu’on parle de personnes “trop sensibles” ou “à fort caractère”. Je suis d’accord de dire qu’il y a des degrés dans ces traits de personnalité, mais mettre des cases avec des “+” ou des “-” que la “normale” revient à admettre qu’il existe une norme et que les personnes étiquetées sont en dessous ou au-dessus, et cette notion me pose problème.
Si envisager qu’il existe des bébés aux besoins intenses, et que le vôtre corresponde à ce profil vous a aidé à prendre connaissance de l’importance du maternage proximal chez les tout petits, c’est très bien. Je ne remets en question ni la démarche qui permet un changement de lunettes, ni de pratique dans l’absolu.
Ce que je déplore plutôt c’est que bien souvent, on est tentés de faire porter le chapeau à l’enfant en se disant “ouf, en fait c’est lui qui a un problème, pas moi” et justement de ne pas chercher à opérer ces changements. L’étiquetage BABI est donc une démarche avec des conséquences radicalement opposées avec des risques pour la santé et le développement de l’enfant qui ne sont pas négligeables.
Pourquoi y a-t-il plus de BABI dans certains pays que dans d’autres ?
En dehors des disparités dans les pratiques de maternages, il y a dans les différents pays, des différences de culture de la neurodiversité, alors on comble ça par des cases.
Ce qui nous semble épuisant et difficile à comprendre, c’est inhérent à notre système de pensée.
Si dans notre culture on portait systématiquement, cododotait naturellement, etc., on répondrait d’emblée aux besoins de beaucoup de “babi”.
Si l’on baignait dans une culture de l’attachement et du maternage proximal, on ne se poserait pas ces questions.
Mais cela implique toute la société et même l’économie. Les parents qui n’arrivent pas à faire des nuits complètes parce que le lendemain ils doivent se lever aux aurores pour aller travailler, sans leurs enfants, sont, de fait, éloignés de ces pratiques.
Quand on lit “Le concept du continuum”, on se rend compte que c’est tout notre fonctionnement sociétal qui ne correspond pas aux besoins d’épanouissement et de bien être des individus.
Je sais à quel point il peut être difficile de démêler tout ça lorsqu’on manque d’informations. Et c’est pourquoi je me donne pour mission de toujours aider les parents qui sont porteurs de tous les changements.
Mais je ne veux pas le faire en utilisant un terme que je ne trouve pas juste ni d’un point de vue sémantique ni du point de vue des réalités qu’il cache. Et encore moins en utilisant un terme qui fait porter toutes les difficultés au seul enfant.
Pourquoi utiliser un autre terme que BABI ?
Lorsqu’il s’agit de placer ses personnes au-dessus ou en dessous de normes se pose la question de la définition de ces normes.
- Qui définit alors ces normes ?
- Sur quels critères ?
- Quels sont les éléments de mesure et d’évaluation ?
La remise en question du terme BABI n’a donc pas vocation à nier une réalité, mais à contester la légitimité de ce terme :
➡ Pourquoi utiliser ce terme ?
➡ Quelles sont les définitions ? Personne n’en a donné, le Dr Sears lui-même dit qu’il existe une grande subjectivité de la définition liée à nos perceptions.
➡ Dire que des bébés ont des besoins plus intenses suggère qu’il y a une norme que ces bébés dépassent. Quelles sont les normes en termes de besoin ? Et qui les définit ?
On voit bien qu’il n’existe aucune norme à ce sujet et que c’est également lié à la perception du parent, qui de fait est subjective.
Pour discuter des différences d’intensité dans l’expression des besoins et émotions, on peut préférablement utiliser la notion d’intégration neurosensorielle.
En parlant simplement de différences d’intégration neurosensorielle, on inclut toutes les différences sans jugement de “trop” ou de “pas assez”.
Il s’agit de la façon dont les individus perçoivent, intègrent et restituent les informations.
Cette approche permet de voir que des différences existent entre les individus sur ces trois niveaux.
Il y a des individus qui perçoivent plus ou moins intensément certains stimuli.
Il y a des individus qui vont intégrer différemment les stimuli perçus.
Il y a des individus qui peuvent exprimer plus ou moins intensément ce qu’ils ont perçu et intégré…
Cela peut-être inné, mais aussi acquis.
Bébés aux besoins intenses : les réalités qui se cachent derrière ce terme
Quelles sont les causes ?
Lorsqu’on ressent des difficultés au quotidien pour accompagner notre enfant, on peut chercher à identifier les causes qui peuvent être variées :
✅ Des différences de tempérament :
- Dans l’expression des besoins (émotions)
- Dans le décalage entre le tempérament du parent et de l’enfant
- Dans la perception des stimuli et leur intégration
✅ Des problèmes physiologiques souvent ignorés et méconnus (allergies, RGO, freins, problèmes ostéoposturaux voire pathologies plus graves ).
✅ De la non-répondance : des enfants qui expriment intensément leurs besoins jusqu’à être entendus parce que les réponses données ne leur conviennent pas (pratiques séparatistes, maternage distal, qui ne convient à aucun enfant, mais avec lesquelles beaucoup d’entre eux se résignent à être entendus)
- Pourquoi ce terme ne vous aide pas ?
Je comprends l’attrait pour ce concept, j’insiste à donner cette empathie aux parents qui se trouvent désarmés et soulagés avec sa découverte parce qu’il rassure en mettant un mot sur une réalité vécue quand on se retrouve en difficulté face à son enfant qu’on ne comprend pas et pour lequel on a l’impression de faire au mieux, et même plus..
Cela aide à avoir une certaine empathie :
- ✅ Pour son enfant « ouf, mon bébé ne veut pas me mener la vie dure, il a des « besoins différents ». »
- ✅ De la part de l’entourage qui aura un « diagnostic officiel » et arrêtera les critiques vis-à-vis du parent, voir les violences vis-à-vis de l’enfant
Mais ce terme n’aide :
- ❌ Ni le parent qui du coup ne sait pas dans laquelle des trois réalités il se trouve précisément, faisant porter entièrement la problématique sur l’enfant avec un trait de caractère alors qu’il pourrait avoir un peu de pouvoir sur la situation pour aider son enfant à sortir de ces difficultés.
- ❌ Ni l’enfant qui se retrouve stigmatisé
Bébés aux besoins intenses : les solutions
Il n’y a aucune recette ou astuce magique permettant de diminuer les difficultés de notre quotidien de parents. Bien qu’on en trouve de partout, que ce soit en écoutant tante Josette ou en surfant sur les réseaux sociaux…
Peu importe le terme qu’on utilise pour en parler, et quelques soient les raisons des difficultés, voici les premiers sujets qui peuvent aider dans toutes situations difficiles avec un bébé :
- Le changement de lunettes sur votre situation : si vous avez du mal à vous dire que votre enfant fait de son mieux, qu’il n’est en aucun cas “capricieux”, je vous souhaite d’arriver à vous détacher de ses schémas délétères pour les relations parents-enfants.
- Les informations concernant le tempérament : qui vous aideront également à prendre le recul nécessaire et à accepter le décalage possible entre votre tempérament et celui de votre enfant. Ce sont ces informations-là qui m’ont vraiment aidé à aller plus loin dans la compréhension de mon fils lorsque j’étais en difficulté.
- La répondance par le maternage proximal continu : allaitement à la demande, portage physiologique, cododo, éviter les séparations, nourrir le lien d’attachement… Cela demande de se détacher de certaines habitudes, voir d’envisager un congé parental plus long. Comme on l’a vu, notre système socio-économique fait clairement défaut dans l’accompagnement optimal des enfants.
- La recherche de possibles problèmes physiologiques à soulager : à commencer par le RGO, les allergies, les problèmes ostéo-posturaux, les freins restrictifs.
- L’observation et l’écoute active des signaux du bébé pour apprendre à mieux connaître ses modes de communication et anticiper ses besoins. Cela vous permettra de mieux y répondre donc de diminuer les pleurs.
Bébé aux besoins intenses : les gestes du quotidien avec l’ARE
Maintenant que vous avez plus d’éléments pour prendre du recul sur le terme “BABI” et que vous avez des pistes pour apaiser votre quotidien, il vous reste peut-être un besoin d’outils applicables concrètement.
Comme on l’a vu, certains bébés connaissent une sensibilité différente lors des soins qu’on leur apporte.
Le sommeil, l’hygiène, l’alimentation ou la prise en charge de problèmes de santé peuvent alors devenir de vrais défis.
Si vous vous sentez perdus face à l’un de ces sujets, mais que vous tenez à accompagner votre enfant avec respect, j’ai préparé pour vous différents dossiers thématiques pour vous outiller plus amplement.
⏩ Pour accéder à ces fichiers thématiques, il vous suffit d’en faire la demande en cliquant ici.
Maja Mijailovic – Accompagnante parentalité
Merci beaucoup pour cet article clair, synthétique, utile et pratique.
Pour le moment je n’ai pas trouvé mieux. Chacune et chacun pourront se faire leur opinion.
Au top 👍👏😀
Bonjour Claire,
Je vous remercie d’avoir pris le temps de me faire votre retour !
Bien à vous,
Maja
C’est un article formidable. On prend plaisir à vous lire. Mon fils à 4 mois, le pédiatre laisse penser que peut-être il a des « besoins intenses ». C’est bête mais il y a quelques semaines je regardais un documentaire sur les primates. Le bébé sans cesse agrippé à sa maman. C’est tout ce qu’il souhaite mon garçon… un rappel à la nature, à la source et à tant de choses oubliées. L’accouchement naturel, l’allaitement et ensuite le contact corporel pour nous rappeler à notre vraie nature
Bonjour, Je vous remercie pour votre message, il y a effectivement quelques éléments de répondance dont nous avons été coupés par nos modes de vie et injonctions sociales et culturelles mais qui profitent grandement, à l’enfant, au parent et au lien parent/enfant.