« Astuces Terrible two » : stop aux fausses bonnes idées

Lorsque nos enfants traversent une période qu’on appelle “terrible two” (ou la “phase du non”) nous aimerions, très logiquement, trouver des astuces pour gérer ce passage houleux au mieux.

On va voir plus loin pourquoi désigner cette phase de “terrible two” manque d’étayage.

Mais avant cela, analysons en quoi les conseils les plus répandus (se voulant positifs et “bienveillants”) renforcent en réalité vos problématiques.

Astuce n°1 : “Faites diversion” / “Détournez l’attention de l’enfant”

Un enfant en crise, ça nous dérange ou ça nous brise le cœur. Dans les 2 cas, on a envie que ça cesse.

Et vite !

Alors, la bonne ficelle la plus utilisée c’est évidemment d’attirer l’attention de l’enfant vers autre chose, n’importe quoi, du moment qu’il zappe un instant l’objet convoité qu’on ne pouvait/voulait pas lui fournir.

Que les mamies aient toujours une friandise à sortir d’on ne sait où pour faire cesser les pleurs, et qu’à la rigueur on utilise cette ruse de la diversion par automatisme non remis en question, c’est une chose.

Mais là où ça coince, c’est quand on vient ériger la diversion comme pratique efficiente.

Lorsque des professionnels de la petite enfance ou des auteurs de l’éducation positive conseillent expressément de détourner l’attention des enfants pour

  • faire taire des cris / pleurs,
  • faire faire à l’enfant quelque chose qu’il ne veut pas faire,
  • faire passer une frustration,
  • lui faire oublier ce qu’il demandait
  • etc.

C’est non seulement inefficace, mais surtout ça

  • entrave le développement de l’autonomie
  • malmène sa confiance en lui
  • abîme la relation avec les adultes qui s’occupent de lui

Pourquoi cette astuce n’est pas profitable ?

Faire diversion c’est : ne pas s’occuper du besoin initial, ni de la demande de l’enfant, en usant de manipulation. Bien sûr, c’est plus facile que de se confronter au conflit, à la frustration de l’enfant, ou que d’accueillir son émotion.

Rappelez-vous que nos automatismes sont des autoroutes pour notre cerveau dans ce genre de situations.

Or ça reste une mauvaise stratégie :

  • ce n’est pas une façon de répondre au besoin
  • le besoin de l’enfant sera toujours là et va resurgir tôt ou tard (souvent sous une autre forme de demande)
  • la décharge émotionnelle arrivera elle aussi, en conséquence de ce besoin non rempli.

Oui, mais sa demande est irréalisable !

Souvenez-vous toujours : demande = stratégie :

  1. Les stratégies sont des actions qu’on met en œuvre pour remplir nos besoins.
  2. Chez les enfants, elles sont spontanées, archaïques, voire pulsionnelles jusqu’à 6/7ans.
  3. Ils font ce qu’ils peuvent pour répondre à leurs besoins avec leurs capacités (en lien avec leur stade de développement).
  4. Tous les besoins sont légitimes.

Or, évidemment, toutes les stratégies ne se valent pas et ne sont pas toutes acceptables. Certaines peuvent être néfastes, car dangereuses pour l’enfant, d’autres peuvent être néfastes pour autrui.

Si une stratégie est identifiée comme néfaste :

  • on valide son besoin en le verbalisant,
  • on reconnaît la stratégie de l’enfant,
  • on lui explique en quoi elle n’est pas accessible ou acceptable (à adapter à l’âge quitte à passer cette étape si l’on risque de tomber dans les reproches ou la morale en utilisant un simple « tu veux faire comme ça, mais je ne peux pas te laisser alors je te propose ça »).
  • et seulement après cela : on propose une alternative

Bien sûr, on s’attend à ce que l’enfant puisse être d’autant plus frustré, puisque l’alternative proposée ne sera peut-être pas à la hauteur de celle qu’il avait choisie pour remplir son besoin.

La prise en charge de cette émotion apaise les tensions et confirme à l’enfant qu’il a toute notre considération.

Un processus gagnant-gagnant

✓ Si l’on cesse de concevoir les stratégies des enfants comme mauvaises / bêtes / inutiles / pas efficaces,

  • si on les laisse expérimenter au maximum,
  • qu’on s’efforce de toujours reconnaître le besoin et de le valider,

✓ Alors la confiance sera telle que dans d’autres situations, l’enfant pourra plus facilement coopérer.

La relation de confiance est la clé.

Quelle que soit la situation : danger potentiel ou juste parce que dans l’instant on n’y arrive pas (et ce n’est pas un problème de ne pas y arriver, mais il faut prendre la responsabilité de sa propre incapacité, sans faire porter le chapeau à l’enfant) avec cette confiance établie, les stratégies alternatives sont beaucoup plus facilement acceptées par l’enfant.

Astuce n°2 : “Restez ferme” / “Ne cédez pas lorsqu’il teste les limites”

La vraie fausse-route en éducation, c’est de partir du principe que l’enfant agit selon de mauvaises intentions, par volonté d’ennuyer ses parents, de “prendre du pouvoir”, etc.

L’enfant naît sans aucun préjugé et ne développe aucune forme de manipulation si l’on ne lui en apprend pas (il n’en a même pas les compétences jusqu’à au moins 6 ans).

Malheureusement, ces croyances sont encore bien entretenues dans notre société.

En réalité, lorsqu’un enfant formule une demande, il s’agit toujours d’une stratégie pour remplir un besoin.

Donc si l’on reste dans une posture hermétique aux demandes (aussi incongrues soient-elles) on dégrade la relation parent-enfant :

  • en entretenant un rapport de verticalité / de “mieux sachant” (“Je sais ce qui est bon pour toi donc tu dois m’écouter”)
  • en entretenant des rapports de force qui risquent d’aboutir à des violences,

De plus :

  • cela n’aide en rien l’enfant à s’autonomiser, bien au contraire, puisqu’en niant ses besoins on abîme sa confiance en lui et en ses capacités à penser par lui-même,
  • lorsqu’il y a conflit, même si l’enfant finit par se “plier”, c’est par résignation et non par consentement.

L’enfant n’a pas besoin d’apprendre à obéir. Tous les conseils prônant de “garder une fermeté” sont antinomiques d’un accompagnement respectueux.

C’est justement parce qu’on a peut-être été trop “fermes” jusque là (mais que l’enfant n’avait pas les moyens de se “sauver”) que ces comportements qu’on recense sous un “terrible two” (refus, crises, etc.) nous reviennent en boomerang.

Astuce n°3 : “Proposez des (faux) choix”

“Il ne veut pas se laver ? – Demandez-lui s’il veut aller au bain à cheval ou en avion !”

“Elle refuse de s’habiller ? – Proposez-lui de choisir entre son pull bleu ou son gilet rose !”

Les astuces proposant de gérer les refus des enfants en leur donnant de faux choix à faire pullulent dans les livres et sur la toile.

Et si l’on transposait ces manœuvres à une conversation entre adultes ? Comment vous sentiriez-vous si votre partenaire vous demandait si vous préférez aller au ciné ou au resto alors que vous lui expliquez que vous êtes fatigué et n’avez pas envie de sortir ce soir ?

Vous sentiriez-vous écouté ? Respecté ?

Proposer de faux choix aux enfants relève d’une manipulation qui nie à nouveau les besoins qu’il essaie d’exprimer (avec les capacités dont il dispose)

Vous trouverez juste ici un article très complet au sujet de cette ruse pour mieux saisir ses conséquences et savoir quoi faire à la place.

Astuce n°4 “Mettez l’enfant au coin / en retrait” ou “Ignorez ses crises”

“Il ne faut pas devenir esclaves !” “Ne cédez pas à ses caprices” … vous connaissez la musique, n’est-ce pas ?

Pour rappel, un enfant qui traverse une crise de colère ne le fait jamais dans une intention de nuire aux adultes responsables de lui. Oui oui, même lorsqu’il s’agit d’un yaourt qu’on a ouvert dans le “mauvais sens” !

Bien qu’il soit légitime d’être parfois à court de ressources pour accueillir ces frustrations, il n’en est pas moins délétère de lui infliger la double peine en l’isolant :

  • Peine 1 : On nie l’expression de son besoin
  • Peine 2 : On le rejette alors qu’il exprime l’émotion aussi intensément qu’il la vit.

L’isolement est une violence pour l’enfant. La “National Association for the Education of young Children” inclut le recours à la mise à l’écart temporaire dans la liste des mesures disciplinaires nocives, au même titre que les punitions physiques, reproches et humiliations. (cf. Aletha Solter sur le “Time Out”1)

Lorsqu’on impose à l’enfant de s’extraire d’un lieu pour “réfléchir”, se calmer, etc., on ne lui apprend qu’à refouler ses émotions et à conditionner ses comportements dans le seul but d’être accepté par l’autre (la plupart du temps, ses parents).

Grâce aux neurosciences, on sait désormais qu’une émotion forte, chez les moins de 6/7 ans, se doit d’être vécue dans la reliance. Idéalement, cela signifie qu’elle doit être accueillie, verbalisée, donc reconnue pour que l’individu apprenne à vivre ses émotions sans peine. Donc :

  • Soit, vous avez vous-même besoin de reprendre vos esprits et c’est à vous de vous isoler le temps de souffler, sans pour autant ignorer ce que votre enfant traverse donc en verbalisant que là, vous ne pouvez pas l’aider/vous avez besoin de vous isoler un instant/vous allez revenir/etc.
  • Soit, vous avez la possibilité d’accompagner ce qu’il vit et, au besoin (si le contexte n’est pas favorable, qu’il y a du monde autour de vous par exemple) vous pouvez vous isoler AVEC lui pour créer une bulle le temps que l’émotion retombe.

« C’est lorsqu’ils semblent en mériter le moins que les enfants ont le plus besoin d’amour et d’attention »

Aletha Solter

Astuces “Terrible two” : Que faire à la place ?

Dans mes espaces, je vous invite à cheminer vers un accompagnement respectueux de l’enfant. Ce qui nécessite avant tout de se saisir d’informations rigoureuses sur le développement de l’enfant.

Vous retrouverez des dossiers complets en ce qui concerne les problématiques les plus couramment rencontrées telles que :

  • Les écrans,
  • L’alimentation,
  • L’hygiène,
  • La santé et les soins,
  • Les sommeil,

En téléchargement gratuit via ce lien.

En ce qui concerne le terrible two, je vous propose :

  • De comprendre ce qui se cache réellement derrière cette dénomination et quel risque on court à considérer que cette phase est “normale” : cf. vidéo ci-dessous,
  • De prendre conscience (indéfiniment) que chaque demande sous-tend un besoin et qu’il est néfaste (pour le développement de l’autonomie de l’enfant comme pour la relation parent-enfant) de réfuter ces besoins,
  • De changer de regard sur les intentions de l’enfant : partir du principe qu’il fait toujours de son mieux est salutaire dans bien des conflits,
  • De toujours vérifier que les comportements difficiles de l’enfant ne soient pas liés à un problème physiologique (allergies, douleurs, etc.)
  • D’apprendre à composer au mieux avec vos propres ressources (sans s’autoflageller inutilement) en lisant “Enfant en crise VS Parent à bout : Comment on gère ?”

Notes

Maja Mijailovic – Accompagnante parentalité

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